Le cinéma est la projection d’un film sur un écran au moyen d’un faisceau lumineux ; le passage de la lumière à travers les images fixes d’une pellicule mue par un mécanisme et sa projection crée l’illusion d’une histoire qui se déroulerait sous nos yeux. Mais que se passe-t-il quand la lumière elle-même devient le sujet du film ?
C’est la question que contemplent précisément les films de Nathaniel Dorsky. Ici pas de narratif, pas même l’ombre d’un son ; le film lui même est son propre sujet. Au lieu de solidifier l’illusion, la progression des images restaure et nourrit l’instant présent. La lumière jaillit de l’obscurité, non pour permettre le développement d’une histoire qui avancerait vers un dénouement, mais pour épouser l’ici et maintenant et en déployer la plénitude. L’image n’a donc d’autre but qu’être elle même. Être. Les films de Nathaniel Dorsky sont autant de méditations sur la lumière ou plutôt des méditations de la lumière se déployant elle-même dans des formes qui surgissent et s’effacent, naissent et meurent comme un souffle. Cette mise en œuvre du cinéma donne à Nathaniel Dorsky la faculté de se retirer de sa création et de la rendre ainsi universelle, dans le sens où elle nous invite à la contemplation d’une intime présence en de ça ou au delà du « personnel ».
Tout cela peut paraître un peu abstrait mais en quoi ces films participent-ils à notre pratique du zen, de l’assise de l’Eveillé, de l’Eveillé en action, de notre engagement ? Parce qu’au lieu de nous transporter vers un dénouement, le cinéma de Dorsky nous place directement au cœur de l’instant, nous donnant ainsi le sens que tout est déjà là. Il est à l’inverse du paradis perdu, du pêché originel, du manque, de la société de la consommation, de la croyance en la croissance éternelle et de l’exploitation effrénée des ressources et des êtres.
Notre pratique nous invite à restaurer en nous la joie du vivant et à la déployer à travers notre existence toute entière. Dans les mouvements citoyens qui développent la générosité, la convivialité, l’empathie parmi les humains et l’attention, la douceur, le respect à l’égard de de la terre, elle peut être le lieu de ressourcement où l’on découvre qu’il n’y a aucun vide à combler, que foncièrement rien ne manque et que tout est déjà là – parfait.
Et, parce que rien ne manque et que tout est déjà là, il nous faut être des humains et faire vibrer cette perfection dans toutes les dimensions de notre vie.
Genko
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